Pas moins de 49 espèces d’oiseaux nicheurs indigènes sont menacées de disparition en Wallonie. Parmi elles, 16 espèces sont en danger critique d’extinction. Ces chiffres interpellants sont le fruit de la mise à jour de la Liste rouge des oiseaux nicheurs menacés de Wallonie, commanditée par le Service Public Wallonie et réalisée par Natagora. « Elle a été dressée à partir de nombreuses données issues des programmes de suivi des populations, des portails de sciences participatives et d’enquêtes spécifiques récentes », explique Jean-Yves Paquet, directeur du département Etudes de Natagora.
La Liste rouge des espèces menacées est un concept développé par l’Union Internationale de la Conservation de la Nature (UICN) depuis 1964. Elle permet de hiérarchiser les espèces en fonction de leur risque de disparition, de lister les menaces et les pressions connues sur ces espèces, de sensibiliser tous les acteurs et de suggérer les mesures à mettre en place afin de limiter leur risque d’extinction.
En milieu agricole, les oiseaux trinquent
Seules les populations reproductrices d’espèces indigènes ont été prises en considération. A condition que leur première nidification remonte à au moins une décennie.
Au total, 151 espèces ont été traitées. 49 (soit 32 %) intègrent une des trois catégories de menace : 16 (11 %) sont considérées « En danger critique », 14 (9 %) entrent dans la catégorie « En danger » et 19 (12 %) sont classées comme « Vulnérables ». De plus, 22 espèces (15 %) sont jugées comme « Quasi menacées » tandis que seules les 80 dernières sont en « Préoccupation mineure ».
« Les espèces inféodées aux milieux ouverts (zones agricoles, zones humides, friches, landes et fagnes) représentent une proportion plus élevée parmi celles qui sont menacées, alors que les espèces forestières, des milieux urbanisés ou celles qui ne sont pas spécialisées sur un de ces types d’habitats (catégorie « mixte ») comptent pour une moindre proportion », analyse Jean-Yves Paquet.
Communes jadis, menacées aujourd’hui
La situation la plus préoccupante concerne les 20 espèces menacées (soit 13 % du total des espèces nicheuses) dont le statut s’est dégradé au cours de ces 10 dernières années.
Pour 11 espèces, la situation s’aggrave alors qu’elles étaient déjà menacées. Il s’agit de la Perdrix grise, la Tourterelle des bois, le Coucou gris, la Chouette de Tengmalm, l’Engoulevent d’Europe , le Pic cendré, le Pipit farlouse, la Pie-grièche grise, le Serin cini et le Bruant proyer.
« Un phénomène inquiétant , observé à l’échelle du continent est que les oiseaux communs déclinent pour l’instant plus vite que les espèces rares », précise l’ornithologue. Ainsi, 9 espèces autrefois répandues dans notre contrée font leur entrée parmi les espèces menacées de Wallonie : le Vanneau huppé, la Chevêche d’Athéna, l’Hypolaïs ictérine, le Pouillot fitis, le Gobemouche gris, la Mésange boréale, le Moineau friquet, le Bruant des roseaux et la Locustelle tachetée.
« Cette dernière espèce est présente pour la première fois dans la Liste rouge alors qu’elle était encore en augmentation jusqu’il y a une dizaine d’années. Depuis lors, une diminution récente importante (-15,7 % par an en moyenne entre 2009 et 2020) est notée par le système de monitoring SOCWAL (Surveillance des Oiseaux Communs nicheurs en Wallonie). En 12 ans, le déclin est estimé entre -37,5 % et -76,5 % », explique Jean-Yves Paquet.
Quelques bonnes nouvelles
Face à ce tableau teinté de noir, on aurait vite fait de sombrer dans la sinistrose. Ce serait sans porter attention à une note positive. En effet, quelque 12 espèces (8 % du total) sortent de la Liste rouge ou de la catégorie « Quasi menacé ».
Citons la Cigogne noire, du Milan royal, du Faucon pèlerin, du Grand-Duc d’Europe, de l’Alouette lulu, du Rossignol philomèle, du Rougequeue à front blanc, de la Bouscarle de Cetti, du Phragmite des joncs, du Loriot d’Europe, du Grand Corbeau et de la Linotte mélodieuse.
« Certaines de ces 12 espèces restent rares et il ne faut jamais exclure un revirement de situation, mais dans l’état actuel de leur population, il est peu réaliste de penser qu’elles vont disparaître de Wallonie dans un avenir prévisible », conclut l’ornithologue.