45 expéditions menées de par le monde. 29 aires marines protégées (AMP), représentant 6,9 millions de kilomètres carrés de surface océanique, soit une superficie plus de deux fois supérieure à celle de l’Inde. Plus de 300 publications dans des journaux scientifiques peer-reviewed. La mission Pristine Seas, débutée en 2008, n’a pas à rougir de ses concrétisations. Lancée par Enric Sala, anciennement professeur à la Scripps Institution Oceanography (Californie), désormais explorateur et photographe au sein de l’équipe de la National Geographic Society, elle vise, d’ici 2030, à créer 40 nouvelles zones dénuées de pêche et à placer sous protection 30% des océans. L’exposition « Pristine Seas – bringing the ocean back », visible à la gare des Guillemins (Liège), emmène les visiteurs à bord des folles expéditions scientifiques menées par l’entreprise américaine ces dernières années.

A chaque profondeur, sa technique
Lors de chaque expédition, scientifiques et partenaires locaux font équipe afin d’étudier et d’évaluer la biodiversité de la zone cible. Pour ce faire, ils ont recours à diverses méthodes. De la surface à une profondeur de 50 mètres, ils plongent avec palmes et bouteilles, et utilisent des caméras appâts et des caméras en eau libre.
Jusqu’à 100 mètres de profondeur, ils font des plongées avec recycleur. Il s’agit d’un appareil de plongée autonome sophistiqué, offrant une plus grande autonomie que le scaphandre autonome classique.
Plus en profondeur, les scientifiques prennent place à bord d’un submersible habité pour visiter les abysses et autres lieux dépourvus de lumière. Ils utilisent aussi des “drop cam“. De la taille d’un ballon de basket, ces caméras rondes fabriquées par le laboratoire de technologie d’exploration de la National Geographic Society sont lestées et lancées par-dessus bord. Elles vont se fixer proche du plancher océanique et prennent des images des formes de vie évoluant dans l’obscurité. Une fois leur mission arrivée à son terme, elles se détachent de leur lest, et remontent naturellement grâce à leur masse volumique supérieure à celle de l’eau. Il ne reste plus qu’à les collecter en surface, à visionner les prises de vue pour, peut-être, découvrir le faciès de nouvelles espèces ou d’espèces rares.

Protéger en interdisant la pêche
A travers de sublimes photographies et des films, les visiteurs de l’exposition explorent différents milieux océaniques, notamment les récifs coralliens tropicaux. Dans une salle, on s’ancre dans les Seychelles. Cette chaîne de 115 îles située au nord de Madagascar regorge d’une faune sous-marine diversifiée. La mission Pristine Seas s’est rendue dans les îles Extérieures peu peuplées (îles Amirante et Coëtivy ; atolls Farquhar, Cosmoledo et Aldabra). Elle y a réalisé 200 heures de travaux scientifiques. Les premières du genre dans nombreuses de ces localités.
Peu dégradé par l’Homme, l’atoll d’Aldabra héberge des centaines d’espèces endémiques (c’est-à-dire qui ne vivent qu’à cet endroit sur la planète). Il abrite la plus grande population de tortues géantes au monde. Et démontre le potentiel des eaux entièrement protégées.
Les aires marines protégées (qui sont des zones de l’océan où un gouvernement impose des limites à l’activité humaine) dotées d’une interdiction de pêche représentent le plus haut niveau de protection et le plus bénéfique pour la biodiversité. Elles constituent de précieuses zones témoins que l’on peut comparer à des zones perturbées par des activités anthropiques.

De concert avec les peuples autochtones
« C’est en collaboration avec des responsables locaux et des organisations sans but lucratif que l’équipe de Pristine Seas a recueilli des données de terrain qui ont ensuite permis de formuler une proposition visant à créer de grandes zones interdites à la pêche autour des atolls des îles Extérieures », mentionne un panneau de l’exposition.
Des nations insulaires du Pacifique à celles de l’Arctique, en passant par l’Amérique du Sud, Pristine Seas soutient le leadership des peuples autochtones et le rôle qu’ils jouent dans le développement et l’exploitation des avantages liés aux aires marines protégées. Pour l’équipe de scientifiques et d’explorateurs, « les intervenants communautaires sont essentiels à la protection durable de l’océan. »