Inutile de passer la nuit avec un cours de langues (ou de tout autre apprentissage) dans les oreilles. Pendant le sommeil, notre cerveau ne capte quasi pas ces nouvelles informations. Du moins, il ne réussit pas à rendre cohérents les sons qu’il capte. Voilà ce que vient démontrer une doctorante du laboratoire de Neuropsychologie et de neuroimagerie fonctionnelle dirigé par le Pr Philippe Peigneux de la Faculté des Sciences psychologiques et de l’éducation de l’Université Libre de Bruxelles (ULB).
L’hypnopédie, soit la capacité d’apprendre pendant le sommeil, serait donc un mythe. La chercheuse, Juliane Farthouat, aspirante F.R.S-FNRS, est arrivée à cette conclusion après une série d’examens réalisée par magnétoencéphalographie (MEG) chez des volontaires. La magnétoencéphalographie permet d’observer en direct le fonctionnement du cerveau.
Ses travaux ont permis de constater que si notre cerveau est capable de percevoir des sons au cours du sommeil, il par contre incapable de grouper ces sons, des les organiser en une séquence.
Le cerveau endormi capte des sons mais ne les organise pas
« Quelques études récentes ont montré que l’acquisition d’associations élémentaires de type stimulus-réponse réflexe est possible au cours du sommeil, tant chez l’homme que chez l’animal », indique l’ULB. « Néanmoins, elles ne montraient pas si le sommeil permettait des formes plus sophistiquées d’apprentissage ».
La nouvelle étude de l’ULB montre que si notre cerveau est capable de continuer à percevoir des sons au cours du sommeil tout comme à l’éveil, sa capacité de grouper ces sons en fonction de leur organisation dans une séquence n’est présente qu’à l’éveil et disparaît totalement au cours du sommeil.
La doctorante a utilisé la magnétoencéphalographie (MEG) pour enregistrer l’activité cérébrale reflétant l’apprentissage statistique de groupes de sons, pendant le sommeil à ondes lentes (partie du sommeil pendant lequel l’activité du cerveau est fortement synchronisée) et au cours de l’éveil suivant.
Pendant le sommeil, les participants ont été exposés à des flux rapides de sons purs, organisés de manière aléatoire ou structurés de manière à ce que le flux soit groupé statistiquement en ensembles de 3 éléments. Pendant le sommeil, les réponses cérébrales enregistrées en magnétoencéphalographie ont démontré une détection préservée des sons isolés, mais aucune réponse liée au groupement statistique.
Pendant l’éveil par contre, tous les participants ont présenté des réponses cérébrales MEG reflétant le groupement en ensembles de 3 éléments.
Les résultats de cette étude suggèrent des limitations intrinsèques à nos capacités d’apprentissage. Ils montrent que les capacités d’apprentissage du cerveau endormi à de simples associations élémentaires.
Dormir fixe par contre les apprentissages
Le sommeil est par contre utile à la fixation des apprentissages. Une précédente recherche menée au sein du laboratoire du Pr Peigneux l’avait démontré.
Menée sur des enfants âgés d’une dizaine d’années, cette recherche utilisant également la magnétoencéphalographie de l’hôpital Erasme avait permis de montrer que le sommeil, et plus particulièrement une sieste, permettait de consolider les apprentissages.
Notamment en les faisant passer de la mémoire « à court terme » à la mémoire « à long terme ». En dormant, les informations étant transférées de l’hippocampe vers des zones du cortex pour une mémoire à long terme.