Le Belgica, navire de recherche océanographique belge qui vient d'être cédé à l'Ukraine © Thierry Hubin / IRSNB

Le Belgica, célèbre navire de recherche belge, devient ukrainien

14 septembre 2021
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 5 min

Le fameux navire scientifique belge Belgica, en service depuis 37 ans, vient d’être officiellement cédé à l’Ukraine, lors d’une cérémonie dans la base militaire de Zeebruges. Avant la fin de cette semaine, il fera route vers son nouveau port d’attache: Odessa, sur les rives de la mer Noire. Une première croisière scientifique de quelque 8.600 km, au cours de laquelle l’équipage procédera à toute une série de relevés et de prélèvements d’échantillons dans l’Atlantique, la Méditerranée et, finalement, la mer Noire.

« Je suis très heureux que ce navire connaisse une seconde vie, grâce à notre coopération avec le Centre Scientifique ukrainien pour l’Écologie de la mer », a indiqué lundi à Zeebruges Thomas Dermine (PS), le Secrétaire d’État en charge de la Politique scientifique fédérale (BELSPO).

Si le Belgica disposait d’un équipage militaire, son programme scientifique était orchestré par l’Institut royal des Sciences Naturelles de Belgique, un des établissements scientifiques fédéraux relevant de Belspo.

Transfert du Belgica à l’Ukraine, le 13 septembre 2021 à Zeebruges © Christian Du Brulle

25 fois le tour de la Terre

C’est avec une certaine émotion que Ludwig Damman, le dernier commandant du Belgica, a vu les couleurs de la marine belge être remplacées par le drapeau du Centre Scientifique ukrainien pour l’Écologie de la mer, qui assurera désormais l’exploitation scientifique du navire. « J’ai eu la chance de commander le Belgica pendant trois ans et de diriger sa dernière mission, en mars dernier », dit-il. « C’est un navire qui a une longue et belle histoire. »

Deux chiffres permettent de prendre la mesure de ce succès scientifique. Au cours de sa carrière, le Belgica a réalisé un millier de missions mer. Et il affiche plus d’un million de kilomètres au compteur, soit l’équivalent de 25 fois le tour de la Terre !

Tracé de la dernière mission du Belgica en mars 2021 © IRSNB

Des découvertes à gogo

En tant que navire de recherche multidisciplinaire, ce navire de 50 mètres de long a permis de mener des recherches dans les domaines de la pêche, de la biologie, de la géologie, du climat et de la chimie.

« Il a permis à la Belgique de faire mieux que sa part en termes de recherche et de surveillance du milieu marin, d’aménagement de l’espace marin et de l’économie bleue »,  a indiqué le libéral flamand Vincent Van Quickenborne, Vice-Premier Ministre et ministre de la Mer du Nord. Un ministre qui n’a pas hésité à rappeler quelques « découvertes » à porter à l’actif de ce navire scientifique. Les campagnes menées par Belgica ont notamment permis de découvrir des monticules de corail d’eau froide dans le sud-ouest de l’Irlande, mais aussi des volcans de boue au large des côtes marocaines.

Il a aussi permis de mener des missions incombant à la Belgique dans le cadre d’accords internationaux. Il a servi les intérêts économiques du pays, en surveillant les extractions de sable et de gravier au large de nos côtes. Il a aussi permis une surveillance fine de la biodiversité lors de l’implantation et de l’exploitation des parcs éoliens offshores. Enfin, il a été un outil de formation pour des générations d’étudiants issus de nos universités.

Une nouvelle vie en mer Noire et en mer d’Azov

Le 16 septembre, le Belgica quittera la base navale de Zeebruges et mettra le cap sur l’Ukraine et son nouveau port d’attache, Odessa. Pendant ce trajet, qui le verra emprunter l’océan Atlantique, la Méditerranée et, enfin, la mer Noire, son nouvel équipage prélèvera divers échantillons d’eau de mer et de sédiments, analysera les polluants rencontrés, documentera les débris marins flottants et les micro-plastiques. Il prélèvera également des échantillons d’ADN pour évaluer la biodiversité des eaux traversées.

Cet ambitieux programme scientifique, intitulé « Croisière des trois mers européennes » » ainsi que le transfert du navire, sont organisés et financés par le projet UE/PNUD « European Union for Improving Environmental Monitoring of the Black Sea » (EU4EMBLAS).

En octobre, le navire devrait être rebaptisé. « Nous pensons à un nom aussi fort que Belgica, mais adapté au contexte historique ukrainien », souligne un membre de la délégation venue de Kiev. « Peut-être opterons-nous pour le nom d’un fameux biologiste marin de notre pays. Le choix n’est pas encore arrêté. »

Le nouveau Belgica arrivera d’ici la fin de l’année

Les nouvelles missions qui attendent le navire auront comme théâtre la mer Noire, essentiellement, ainsi que la mer d’Azov. « Des eaux où, à ma connaissance, il n’a jamais navigué », indique le commandant Damman. Les premiers scientifiques ukrainiens arrivés à Zeebruges parlent aussi de missions potentielles en Méditerranée, voire dans l’Atlantique. Un océan où le vieux Belgica risquera bien de croiser le sillage de son successeur, le « nouveau » Belgica.

Plus vaste et plus performant que son aîné, celui-ci devrait arriver d’Espagne, où il a été construit, d’ici la fin de l’année. Histoire de mener une première mission dès le début de l’an prochain. Notamment du côté du Groenland. Le nouveau Belgica, qui n’est pas en brise-glace, devrait pouvoir naviguer dans des zones arctiques à la bonne saison. Son programme de travail est actuellement en cours d’élaboration à la direction opérationnelle « Milieux naturels », de l’Institut royal de Sciences naturelles de Belgique.

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