La base militaire d’Elsenborn, dans les Hautes Fagnes, avait un air de centre spatial belge ces derniers jours. Vingt-quatre équipes engagées dans le concours Cansat 2023 Belgium, venues de tout le pays, étaient en compétition. Leur objectif: réaliser la meilleure des missions avec leur canette high-tech lancée par une fusée sonde.
L’équipe lauréate de cette année est celle du projet Ethera, porté par les élèves de 4e année du Collège Saint-Pierre, à Uccle. La mission primaire de leur Cansat est commune et obligatoire pour tous les candidats. Il s’agit de réaliser des mesures de pression et de température lors du vol et de transmettre ces données en direct vers le sol. La mission secondaire, librement définie par chaque équipe, consistait, pour le projet Ethera, à déployer un système d’aérofreinage depuis la canette lors de son retour vers le sol.
Cap sur la finale européenne en juin
« Nous organisons ce concours depuis neuf ans en collaboration avec le SPW Recherche (Wallonie) », explique Sébastien Rush d’Innoviris, l’agence de financement de la recherche scientifique de la Région de Bruxelles-Capitale. « Depuis le début de l’année scolaire, les équipes en lice, composées de groupes d’élèves de l’enseignement secondaire supérieur, développent un projet de Cansat : un satellite miniature de la taille d’une canette de boisson ».
« Au fil des étapes du concours, certaines équipes abandonnent. D’autres persévèrent. Au final, 24 équipes ont été invitées à venir propulser leur Cansat au moyen d’une fusée et à effectuer leurs missions spécifiques. La meilleure équipe de l’année représentera la Belgique à la finale européenne, organisée par l’ESA, l’Agence spatiale européenne, à la fin du mois de juin ».
Le spatial, non dénué de risques
Les Cansats sont propulsés dans le ciel de la base militaire d’Elsenborn par grappes de six, via une fusée à poudre. Après un vol d’une dizaine de secondes, à un kilomètre d’altitude, les Cansats sont éjectés du lanceur et reviennent au sol en douceur grâce à leur petit parachute. Les données de chaque Cansat sont captées par télémétrie, la plupart du temps via une antenne râteau construite et calibrée par les participants. Les engins sont, ensuite, récupérés dans le champ de tir militaire et restitués aux équipes qui analysent alors l’état de leur satellite et le contenu de la carte mémoire de bord.
Mais comme toute aventure spatiale, les choses ne se déroulent pas toujours comme prévu. L’échec de la gigantesque fusée Starship de Space X, aux États Unis, a été retentissant. À Elsenborn, trois des cinq fusées (quatre plus une fusée de réserve), ont également connu de sérieux problèmes. Une d’entre elles n’a pas quitté le sol, et deux autres n’ont pas déployé leur parachute ni éjecté leurs Cansats. La plupart des équipes n’ont donc pas pu réaliser leurs missions. Et bien souvent, elles n’ont récupéré que les débris de leur engin.
Le troisième tir a été marqué par un raté du moteur peu après le décollage. La fusée s’est ensuite écrasée au sol, dans le champ de tir de la base militaire, réduisant en miettes les six Cansats embarqués. Vidéo B. Jambe :
« Les trois ratés semblent chacun résulter d’un problème différent », explique-t-on chez T-Minus, la société hollandaise chargée de ces opérations de lancement. Une entreprise qui n’avait jamais connu, en dix ans, une telle série noire lors d’une campagne de tirs.
Expérience pédagogique et humaine
Déçues les équipes ainsi privées de leur Cansat ? Évidemment ! Mais, dans ce concours, la solidarité a joué. Les équipes privées de leur engin ont donné un coup de main aux autres, ou ont pu bénéficier de leurs données de vol pour réaliser des analyses diverses. Cansat Belgium est un concours, mais aussi une expérience de résilience et de collaboration.
Outre les aspects pédagogiques et d’initiation, notamment, aux sciences de l’ingénieur, cette expérience a aussi suscité l’enthousiasme des enseignants venus encadrer leurs élèves à Elsenborn.
« Tout au long de ce concours, nous avons pu développer une autre relation avec nos élèves », souligne un des professeurs présents. « Nous sortons du cadre enseignant-évaluateur. Nous développons une meilleure compréhension mutuelle en travaillant ensemble sur un projet commun. Cela apprend aussi aux élèves à gérer les contraintes du travail en équipe. Et pour nous, professeurs, cela nous offre la possibilité de mieux comprendre nos élèves quand nous les avons en cours. »
Tout au long de la finale, la motivation des élèves était bien palpable. Pour celles et ceux qui ne sont pas en sixième année, c’est clair, le rendez-vous est déjà pris pour l’année suivante. Cap sur Cansat Belgium 2024!