« D’ici à 2030, la demande en batteries va être multipliée par 14 ! », assène le Pr Bao-Lian Su, directeur du laboratoire de chimie des matériaux inorganiques à l’Université de Namur. Face à ce constat, il a initié le portefeuille de projets BatFactory lequel vise à créer des prototypes de batteries de nouvelle génération, et à les tester avec des entreprises du terroir. Avec l’espoir, d’ici 2030, de créer une filière industrielle complète de production de batteries en Wallonie. « Notre territoire compte des entreprises tout à fait compétentes dans chacun des points de la chaîne de production », assure le Pr Su, coordinateur de BatFactory.
8 partenaires et 11,4 millions d’euros
Ce portefeuille de projets a débuté en janvier 2024, et s’étend sur 3 ans. Il jouit d’un budget de 11,4 millions alloués par la Région wallonne, dans le cadre du plan de relance de la Wallonie.
« Le potentiel de développement des batteries est immense. BatFactory constitue le point de départ du déploiement jusqu’en 2030 d’un Réseau de Valeur Structurant “BatteryWal” pour développer les communautés d’énergies, un habitat durable et un support à l’e-mobilité. En soutenant ce projet, nous consolidons l’amont de la chaîne de valeur des batteries en Wallonie », explique Willy Borsus, Ministre de la Recherche et de l’Innovation (MR) dans un communiqué.
Développer les synergies locales, affiner les compétences industrielles wallonnes et dépendre le moins possible de l’étranger sont des objectifs cruciaux de BatFactory. La collaboration établie avec l’entreprise wallonne Tcharbon afin d’utiliser les déchets de bois pour produire les électrodes des batteries, illustre remarquablement la volonté de cette nouvelle dynamique .
L’ensemble des projets de recherche du portefeuille – d’un niveau de maturité technologique intermédiaire – est mené de front par l’UNamur, l’UMONS, l’ULiège, l’UCLouvain, l’ULB, Materia Nova, le CRM, et CENAERO. Rien qu’à l’UNamur, 6 chercheurs ont été ou vont être engagés. Parmi ceux-ci, un poste sera dédié spécifiquement au suivi et à la coordination de ce programme.
Remplacer le lithium
En 2022, le Parlement européen a annoncé qu’en 2035 les véhicules thermiques seront interdits à la vente. Depuis lors, les constructeurs planchent sur le développement d’automobiles électriques, avec en ligne de mire, la création de batteries bien plus performantes que celles d’aujourd’hui.
« Améliorer la performance des batteries est, en effet, un des grands défis des équipes de recherche. Ainsi que l’augmentation de leur sécurité. A cela s’ajoute le problème de la pénurie de Lithium », précise le Pr Bao-Lian Su.
Actuellement, la majorité des batteries disponibles sur le marché sont des batteries « lithium-ion ». Le lithium y est prépondérant et essentiel. La Commission estime que d’ici 2050, il en faudra 60 fois plus qu’aujourd’hui. Mais les mines ne sont pas infinies. Si bien que ce métal est repris dans la liste des matières premières critiques établie par la Commission européenne.
Avec son équipe de chercheurs, le Pr Bao-Lian Su étudie depuis des années les alternatives visant à remplacer ce lithium par du sodium, du potassium, du magnésium ou du zinc.
Il travaille également à faire évoluer la technologie. Fini le « lithium-ion », place, dans un premier temps, au « lithium-oxygène ». « Cette nouvelle technologie implique un autre déplacement d’ions pour le stockage d’électricité, lequel pourrait être accru de 10 fois voire davantage. De plus, les réactions chimiques entre lithium et oxygène sont très sécurisées. En parallèle, et dans l’optique de nous passer du lithium, nous travaillons sur une batterie sodium-oxygène et une autre zinc-oxygène. »
« A l’avenir, le marché des batteries sera bien plus diversifié qu’aujourd’hui », conclut le Pr Bao-Lian Su.
La présentation de Batfactory a eu lieu lors de la célébration des 50 ans de la faculté de chimie de l’UNamur. L’occasion de mettre en avant une recherche en sciences chimiques ayant directement des répercussions tangibles sur la société.