Une approche prometteuse pour les enfants autistes

25 avril 2014
par Raphaël Duboisdenghien
Temps de lecture : 4 minutes

Tout va trop vite pour beaucoup d’autistes. «Ce décalage temporel avec le monde environnant induit une cascade de désordres émotionnels, communicatifs et relationnels», explique Bruno Gepner, ancien professeur de psychiatrie infanto-juvénile à l’Université de Liège.

 

«Il se traduit souvent par des incompréhensions, une lenteur et des maladresses. Mais il peut aussi s’accompagner de particularités perceptives et d’une rapidité cognitive parfois étonnantes dans certains domaines.»

 

Autismes, par Bruno Gepner, Ed. Odile Jacob
Autismes, par Bruno Gepner, Ed. Odile Jacob

Depuis 70 ans, les causes des troubles autistiques éveillent questions, recherches et controverses. Parmi les facteurs de risque, les études pointent des anomalies de la structure des chromosomes, l’âge avancé des parents, l’exposition de la mère à des agents chimiques toxiques ou la contamination par des agents infectieux pendant la grossesse, l’influence de l’environnement sur l’expression du génome… Ces désordres, découverts par le psychiatre Leo Kanner et le pédiatre Hans Asperger, touchent presque 1% de la population.

 

Un logiciel de ralentissement

 

Bruno Gepner enseigne actuellement à l’Université d’Aix-Marseille. Depuis 25 ans, il développe une approche théorico-clinique des troubles autistiques. Il a mesuré, avec la professeure de psychologie Carole Tardif, les bénéfices thérapeutiques du ralentissement des informations sur le développement des enfants autistes.

 

Avec des ingénieurs et des concepteurs de logiciels, ils ont réalisé un programme informatique qui diminue la vitesse de tous les types de signaux visuels et sonores, le Logiral, acronyme de «logiciel de ralentissement».

 

Les chercheurs ont mesuré l’effet de visionnage de séquences audiovisuelles ralenties ou non sur des enfants et des adolescents autistes. Les résultats montrent clairement des performances meilleures en attention visuelle, en compréhension et communication lorsque la vitesse est moindre.

 

Dans une autre étude, quatre enfants atteints d’autisme sévère ont bénéficié de séances hebdomadaires de ralentissement pendant trois mois. Les résultats révèlent une augmentation significative des comportements positifs. Et une diminution des comportements inadaptés.

 

Des résultats encourageants

 

«Les premiers résultats de l’application thérapeutique du ralenti semblent très prometteurs», conclut le Pr Gepner. «Ils doivent toutefois être appliqués et analysés auprès de plus grandes cohortes d’enfants. Avec la psychologue Aurore Charrier, nous conduisons une étude clinique destinée à confirmer les bénéfices du ralentissement des signaux visuels et sonores sur le développement imitatif, verbal et socio-émotionnel de jeunes enfants autistes.»

 

Le livre «Autismes» de Bruno Gepner est porteur d’espoirs pour les enfants et leurs parents (éd. Odile Jacob, 23,90 euros). Après avoir décrypté les anomalies qui affectent le développement et le fonctionnement du cerveau, le pédopsychiatre décrit les progrès scientifiques qui permettent, et permettront, d’améliorer les traitements.

 

Des parents déboussolés

 

"Autisme, comment rendre les parents fous", par Catherine Vanier, Ed Albin Michel
“Autisme, comment rendre les parents fous”, par Catherine Vanier, Ed Albin Michel

De son côté, la psychanalyste Catherine Vanier a demandé à la journaliste Bernadette Costa-Prades de recueillir des témoignages auprès des parents. La docteure en psychologie qui travaille à rendre plus douce la vie des enfants autistes se révolte quant au sort réservé à leurs parents dans «Autisme: comment rendre les parents fous!», paru aux éditions Albin Michel (15 euros).

 

Catherine Vanier stigmatise les classifications étasuniennes du DSM, Diagnostic and Statistical Manuel of Mental Disorders, la bible des troubles mentaux.

 

«Avec la cinquième version du DSM, un pas de plus vient d’être franchi. Il n’y a plus de troubles envahissants du développement. Tous les troubles sont rangés sous la bannière trouble du spectre autistique. Incluant l’autisme typique et toutes les nuances allant jusqu’à l’enfant timide qui a du mal à établir le contact avec les autres.

 

En créant cette immense enveloppe qui inclut différents problèmes, les auteurs du DSM ne se rendent pas compte des ravages que le mot déclenche chez les parents. À ce train-là, certains enfants précoces risquent désormais de tomber dans l’escarcelle de l’autisme, car ils ont effectivement des problèmes d’intégration scolaire…»

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