Gros plan d'une radiographie d'un doigt fracturé © Raw Pixel

Arthrose : de nouveaux traitements à l’étude grâce à la simulation informatique

13 décembre 2023
par Camille Stassart
Temps de lecture : 3 minutes

Selon une étude réalisée en 2018 par l’Institut scientifique de Santé publique (Sciensano), plus d’1 adulte sur 7 souffre d’arthrose en Belgique. Cette maladie articulaire se caractérise par la dégénérescence du cartilage – le tissu qui joue le rôle d’amortisseur entre deux os –, l’inflammation de la membrane qui tapisse l’intérieur de l’articulation, et un remodelage de la couche osseuse sous le cartilage. Si l’arthrose peut évoluer lentement, sans entraîner de handicap majeur, il arrive que la maladie progresse rapidement et demande, à terme, la pose d’une prothèse.

Pour l’heure, aucun traitement n’existe pour enrayer son développement. Trouver de nouvelles techniques de médecine régénérative du cartilage sera l’objectif du projet INSTant CARMA (In Silico Trials for Cartilage Regenerative Medicine Applications), mené par la Pre Liesbet Geris, responsable de l’Unité de Recherche Biomécanique à l’ULiège.

L’arthrose ne concerne pas que les seniors

Les partenaires du projet chercheront particulièrement de nouveaux traitements pour l’arthrose du genou consécutive à un traumatisme. Les personnes ayant subi un choc avec une lésion cartilagineuse (fracture articulaire, entorse négligée, luxation, ablation du ménisque…) sont, en effet, à risque de développer de l’arthrose au cours de leur vie.

« Dans ce cas, les moins de 50 ans peuvent aussi être touchés par la maladie. Or, chez ces patients, la pose d’une prothèse n’est pas idéale, puisque sa durée de vie tourne autour de 15, 20 ans. Il faudra potentiellement la remplacer à un moment donné. Et changer une prothèse de genou est une opération généralement plus lourde que la première intervention », rappelle la Pre Liesbet.

Côté médicaments, les seuls traitements pharmacologiques disponibles visent à soulager la douleur (paracétamol, anti-inflammatoires non-stéroïdiens, opioïdes, infiltration de corticoïdes), et certains peuvent présenter des effets indésirables sur le long terme.

Personne souffrant du genou © Raw Pixel

L’informatique au service de la médecine régénérative

Dans le cadre de cette étude, Liesbet Geris et son équipe miseront sur la médecine computationnelle, aussi appelée médecine in silico. Née il y a quelques années, cette approche a pour but de modéliser, simuler et observer des processus biologiques, physiologiques et médicaux dans un environnement virtuel. Ce qui présente l’avantage de générer rapidement des milliers de scénarios différents, mais aussi de limiter les expériences in vivo (sur les animaux ou sur l’humain), et donc de réduire les coûts.

Dans un premier temps, les scientifiques développeront un modèle informatique visant à simuler l’apparition et la progression de l’arthrose du genou post-traumatique, en vue de mieux comprendre la manière dont celle-ci s’installe. Les chercheurs intégreront à ce modèle l’influence de la mécanique de l’articulation au niveau de l’os et des tissus du cartilage, mais aussi au niveau des cellules. Les mécanismes moléculaires conduisant à la maladie seront également évalués.

« En déterminant les facteurs (ou combinaisons de facteurs) biologiques responsables, on pourra mettre à jour des stratégies pour lutter contre la dégénérescence du cartilage, et ainsi ralentir, voire stopper, la progression de la maladie chez ces patients. »

In silico, in vitro, in vivo

Par la suite, des essais cliniques sur un groupe de patients virtuels seront réalisés, en vue de tester différents traitements jouant sur ces facteurs ou combinaisons de facteurs. Le premier essai étudiera l’effet de plusieurs pistes pharmaceutiques prédites par le modèle. « On ne va pas nécessairement développer de nouveaux médicaments. S’ils en existent déjà pour cibler ces facteurs, on les exploitera. »

Un second essai s’intéressera aux thérapies d’ingénierie tissulaire, c’est-à-dire des implants « vivants » osseux et cartilagineux à base de biomatériaux, capables de reformer de nouveaux tissus qui s’intégreront totalement au corps du patient.

« Si l’on arrive à des résultats probants lors de ces expériences in silico, on tentera de les valider à l’aide de tests in vitro, sur des cellules animales isolées en laboratoire, et in vivo, sur des animaux », conclut la Pre Geris.

Ce projet bénéficie du soutien du Conseil européen de la recherche par le biais d’une bourse ERC Consolidator Grant.

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