Aux origines de votre nom de famille

14 janvier 2022
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 4 min
"Histoire des noms de famille français", par Xavier Deniau. Editions L’Harmattan. 27 euros en VP; 20,99 en VN
« Histoire des noms de famille français », par Xavier Deniau. Editions L’Harmattan. 27 euros en VP; 20,99 en VN

« La plupart des noms de famille belges ont sept siècles d’existence. Et dans certaines régions, ils ne se sont fixés que tardivement ». Dans son livre « Histoire des noms de famille français », publié à titre posthume aux éditions L’Harmattan, Xavier Deniau, spécialiste français de l’onomastique, la branche de la linguistique qui étudie les noms propres, dresse un état des lieux des origines des noms de famille.

L’ouvrage raconte en priorité deux mille ans de constitution du patrimoine onomastique en France. Toutefois, le livre propose également un regard sur la Belgique, la Suisse, et même le Canada francophone. Et particularité pour la Belgique, si ce sont les noms de famille français qui intéressent en priorité l’auteur, celui-ci ne fait pas abstraction, quand cela s’impose, de la double lignée belge : francophone et néerlandophone.

De l’époque romaine à la Belgique actuelle

D’où viennent les noms de famille en Belgique? Selon Xavier Deniau, à l’époque romaine, certains habitants de la Belgique avaient adopté le mode de dénomination romain. Cependant, la grande majorité de la population n’avait qu’un seul nom, complété par celui du père. « L’arrivée des Francs imposa rapidement l’usage du nom unique. Dans le même temps, les noms gaulois et romains furent évincés par les noms germaniques », indique-t-il.

À partir du Xe siècle, le répertoire a tendance à se figer. Progressivement, les noms chrétiens s’imposent. Ils sont puisés dans l’Ancien et le Nouveau Testament parmi les noms de saints ou de martyrs.

« En règle générale, plus le répertoire onomastique s’appauvrit, plus l’usage des surnoms prend de l’ampleur. Sous le régime du nom unique, deux personnes portant le même nom de baptême étaient identifiées à l’aide du nom du père, de la mère, voire des grands-parents. En Wallonie, au Xe siècle, il y avait une nette prépondérance des noms germaniques qui étaient alors d’une remarquable variété. Au cours des XIe et XIIe siècles, leur nombre diminua sensiblement. »

Références géographiques

Cet appauvrissement du vocabulaire anthroponymique déboucha sur des problèmes d’homonymies, génératrices de confusions. D’où l’ajout, au nom des personnes, de celui de leur habitat, de leur origine, de leur métier, de leur charge. L’auteur prend l’exemple du peintre Jan Van Eyck. « Le peintre Jan Van Brugge, né vers 1366 à Eyck, et le peintre Jan Van Eyck ne sont peut-être qu’une seule et même personne, », estime-t-il.  « On lui aurait alternativement donné le nom de son domicile et celui de son lieu de naissance ». De cette pratique dérivent les noms comme (van) Brabant, De Flandre, mais aussi Dardenne, Lardinois, Fagnard, Adnet Campinaire, ces derniers faisant référence à des régions naturelles.

Pour mettre fin à l’anarchie des patronymes, et la mainmise des registres paroissiaux dans leur recensement, Marie-Thérèse d’Autriche enleva au clergé le privilège de tenir seul les registres des baptêmes, mariages, sépultures, et chargea les autorités civiles de surveiller la rédaction des actes. Quant au respect de l’orthographe des noms, il fut rendu obligatoire en 1791.

Les métiers à l’honneur

Actuellement, un grand nombre de noms de famille appartiennent, dans toute la Belgique, à une même zone linguistique. Ce sont surtout des noms de baptême fréquemment représentés ; les noms formés d’un lieu-dit courant (comme bois, bosch) ; les noms des métiers indispensables et exercés dans chaque village, tels Boulanger, (Becker en flamand), Meunier (Mulder), C(h)arpentier (Timmermans), Charron (Raymacker).

Des noms aux déclinaisons régionales parfois remarquables. Dans la région brabançonne, on ajouta parfois un « s » initial à certains de ces patronymes, Smulders ou Swolfs par exemple.

Des caractéristiques onomastiques régionales sont également mises en lumière par l’auteur. Ainsi, en région liégeoise, il relève que les noms de famille les plus fréquents sont Leclercq, Lejeune, Charlier, Maréchal, Gérard, Collard, Lambert, Bertrand et Léonard. Mais aussi Dubois, « patronyme par ailleurs le plus fréquent dans l’arrondissement de Nivelles et les communes wallonnes des arrondissements de Louvain et de Bruxelles. »

Particularismes régionaux

« Les noms de famille de Flandre sont fortement influencés par les noms français, tout proches, tandis que dans le nord du pays, l’onomastique hollandaise a remplacé dans beaucoup de noms le ‘ae’ typiquement belge par le ‘aa’ employé depuis longtemps en Hollande.»

Quant aux noms de famille les plus répandus en Belgique, Xavier Deniau, identifie en tête de palmarès les Janssens, Desmet, Devos et Dubois. En France, il s’agit des Martin, Bernard, Durand et Dubois. Des patronymes qui, contrairement à d’autres, susceptibles de disparition, ne font que se renforcer. L’auteur estimant que d’ici à 2180, un Français sur 150 s’appellera Martin…

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