Innovation: objectif « transmédia »

15 novembre 2016
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 6 min

Difficile de résumer en une phrase le transmédia, ce concept riche en technologies numériques, en créativité et qui est clairement frappé du sceau de l’innovation. Ce qui est certain, c’est qu’il constitue une voie d’avenir à Bruxelles comme en Wallonie, qu’il s’agisse de recherche, autant fondamentale qu’appliquée, que de développement de nouveaux services et produits.

 

Pascale Delcominette, Administratrice générale de Wallonie-Bruxelles International (WBI), se risque à l’exercice de la définition. « Le transmédia est une nouvelle manière de communiquer et de créer », indique-t-elle. « Il passe par la dématérialisation des contenus. Il change la vie et notre économie, mais aussi les comportements des consommateurs. D’une attitude passive face à un média traditionnel, il devient actif. Le modèle top-down est donc mis à mal. Nous sommes ici dans une approche non linéaire. Le contenu est créé par différents médias, en même temps. Il y a ensuite convergence, interopérabilité ».

 

Les nouveaux ambassadeurs des sciences et de la recherche

 

WBI, l’agence qu’elle dirige, est chargée des relations internationales de la Wallonie, de la Fédération Wallonie-Bruxelles et de la Commission communautaire française de la Région de Bruxelles-Capitale. C’est dans ce cadre qu’elle avait rassemblé il y a quelques jours à Namur une belle brochette de partenaires potentiels en transmédia. Des partenaires venus du Québec, de France, de Suède, d’Allemagne ou encore de Suisse, bien décidés à partager leurs expériences dans le domaine.

 

Ce n’est pas un hasard si cette confrontation d’expériences en transmédia était orchestrée par les attachés de liaison scientifique (ALS) de WBI. Les « ALS » sont les nouveaux « ambassadeurs » des sciences et de la recherche de la FWB. La Wallonie a en effet joué un rôle important dans le programme européen « Eurotransmedia », qui vient de s’achever.

 

Le transmédia fait son cinéma en Suisse

 

« Ce programme a permis de dessiner les contours de l’agenda de la Recherche en transmédia pour les dix à vingt ans à venir », souligne Pascale Delcominette. « Un avenir qui passera par des collaborations stratégiques au sein de nos régions, mais aussi avec des partenaires étrangers ».

 

La Suisse par exemple? « Pourquoi pas », propose Marianne Wirth, du festival du film de Solothurn, organisé au début de l’année prochaine. C’est là un excellent banc d’essai pour les projets culturels ».

 

La prochaine édition de ce festival, prévue au début de l’année 2017, comprendra donc un volet transmédia. « Pour être qualifiées de transmédia, les œuvres proposées doivent nécessairement avoir été conçues pour être « consommées » via Internet ou via des supports mobiles », précise-t-elle. « Elles doivent comporter également au moins un segment audiovisuel ainsi qu’un volet interactif. Bien sûr, il faut également que chaque séquence de l’œuvre prise individuellement ait un rapport narratif avec les autres ». Nous sommes dans un festival du film, après tout!

 

Téléconférence, téléportation ou voyage à l’ancienne ?

 
D’un point de vue moins artistique, mais clairement orientée innovation, recherche technologique et « business », l’analyse québécoise en matière de transmédia est limpide.

 
« Quand on parle du potentiel économique du transmédia, on pense bien entendu aux développeurs de solutions, aux jeunes entreprises, aux géants de l’Internet. En réalité, le transmédia s’adresse à chacun d’entre nous. Y compris dans le cadre de banales télécommunications , estime Luc Courchesne, qui dirige le SAT Metalab » de Montréal (« Société des arts technologiques Metalab »). Le SAT Metalab est un centre de recherche créé par quelques professeurs d’universités du Québec.
 

Révolutionner les téléconférences 2D

 

« Le transmédia, ce n’est pas se téléporter sous forme d’avatar magnifié et irréel. Ce n’est pas le méta-univers et digital de Mark Zuckerberg (le fondateur de Facebook). Le transmédia, il faut y être soi-même, avec notre propre dimension physique, nos attitudes personnelles qui font qu’on est ce que nous sommes, et pas une sorte de pantin ».

 

« Ce n’est qu’à ce prix que les réunions virtuelles, celles qui vont remplacer les téléconférences vidéo classiques et autres discussions en 2D de type « Skype », seront véritablement efficaces ».

 

Si notre téléprésence se mue en l’illusion que nous sommes réellement et virtuellement présents au bout du monde pour tenir une conversation avec divers interlocuteurs, nous pourrons alors réellement faire l’économie de déplacements longs et coûteux, qui durent des heures voire des jours et ce pour ne discuter au final que quelques dizaines de minutes… Tout le monde y gagne. Les entreprises en frais de voyage, les personnes en fatigue et en temps perdu et l’environnement, qui fait l’économie de déplacements polluants ».

 
Réforme des rythmes de travail

 

Si le SAT Métalab s’est fait une spécialité de la recherche en téléprésence virtuelle, en représentation des personnes dans les univers numériques, de multiples autres champs de recherche demandent encore à être explorés dans le contexte du transmédia.

 

Cela va des technologies à développer, des logiciels à concevoir, des outils à imaginer aux bouleversements que cela peut signifier pour la Société. Par exemple dans la réforme du monde du travail.

 

« A terme, le travail par pause, le 3X8 heures, n’existera plus », estime encore ce spécialiste en « Visual studies », formé au Massachussets Institute of Technology (États-Unis).

 

Le transmédia dans ce contexte va également révolutionner nos rythmes de travail. Aujourd’hui déjà, dans certains domaines du travail dématérialisé, on travaille 24 heures sur 24 en comptant sur des collaborateurs répartis tout autour de la planète. Quand un travailleur au Canada termine sa journée, celle de son collègue chinois débute. Il prend naturellement le relais du travail en cours, avant de le repasser, quelques heures plus tard, à sa collègue canadienne. C’est là que se situent les révolutions dans l’organisation du travail », estime-t-il.

 

Une opportunité pour sauter quelques étapes de développement

 

Recheche, innovation, créativité… Le transmédia se situe à la croisée de toutes ces disciplines. En Fédération Wallonie-Bruxelles, les relais et les outils pour développer ce pan de l’économie digitale ne manquent pas.

 

Les acteurs clés, dans ce domaine s’appellent par exemple Creative Wallonia, Innoviris (l’Institut bruxellois pour la recherche et l’innovation), le cluster Twist et bien sûr l’Agence du numérique.

 

« Il n’y a plus qu’à en tirer profit », soulignait voici quelques jours, dans le cadre du Collège Belgique à Charleroi le Pr Benoît Macq, de l’Université Catholique de Louvain (UCL). « L’Internet du futur (proche) va permettre à l’industrie wallonne de faire de grands progrès. Et même, pourquoi pas, de sauter quelques étapes de son développement ».

 

Haut depage