Le satellite Gaia cartographie le ciel depuis 2014. Sa carte inclut des étoiles un million de fois moins lumineuses que celles que l’on peut voir à l’œil nu. Publiée en juin 2022, la troisième version du catalogue d’étoiles Gaia, dénommé Gaia DR3, est le plus complet et le plus détaillé disponible à ce jour. Il constitue une étape importante de la recherche en astronomie. La précision exceptionnelle des distances, des mouvements et des paramètres fondamentaux des étoiles, ainsi que la classification des quasars et l’astrométrie précise des astéroïdes font désormais partie du quotidien et des travaux de recherche de la plupart des astronomes.
L’Agence spatiale européenne (ESA) et les équipes de collaboration Gaia viennent de publier de nouvelles données. « Ces publications très prometteuses et ciblées donnent un bon aperçu de ce que sera la quatrième version du catalogue Gaia (Gaia DR4), attendue pour la fin de l’année 2025 », se réjouit-on à l’Observatoire Royal de Belgique.
Omega Centauri au centre de l’attention
L’amas globulaire Omega Centauri est l’une des pièces maîtresses de ces nouvelles données. L’amas contient environ 10 millions d’étoiles rassemblées de façon très compacte dans le ciel, mettant Gaia au défi de les résoudre spatialement.
« En vue de la publication du catalogue Gaia DR4, diverses techniques sont prévues pour traiter les données dans les régions les plus intéressantes et les plus densément peuplées. Le retraitement des données de l’amas Omega Centauri, avec ces techniques adaptées, a permis d’obtenir l’astrométrie et la photométrie de 526 587 étoiles supplémentaires situées dans son noyau. »
Alors que Gaia observe les mêmes étoiles plusieurs fois à des époques différentes, l’ESA n’a publié jusqu’à présent que des mesures moyennées. « Cela n’a pas empêché Gaia d’identifier des étoiles variables, mais les caractéristiques telles que leur photométrie instantanée et les vitesses radiales utilisées dans le processus de classification ne sont pas encore publiées. »
Etoile variable à longue période
« En attendant Gaia DR4, lorsque toutes les observations (mesures instantanées et moyennes) seront disponibles, une publication partielle des séries temporelles des données les plus précises acquises pour 9164 étoiles variables à longue période fait partie des nouvelles données fournies par l’ESA. Elle aidera la communauté scientifique à se préparer à la richesse et à l’énorme quantité de données que Gaia fournira en 2025. »
Que sont les étoiles variables à longue période ? « Les étoiles comme Mira Ceti, aussi appelée étoile merveilleuse de la constellation de la Baleine, ont une luminosité qui varie avec une périodicité de l’ordre d’un an. Et, comme c’est le cas pour Mira Ceti, elles passent de l’étoile la plus brillante de leur constellation à une étoile à peine visible à l’œil nu. Ces variations de luminosité sont dues à des pulsations qui font varier leur rayon et leur température de manière substantielle. Les étoiles variables à longue période représentent un stade avancé de l’évolution d’étoiles comme notre Soleil, lorsque leur rayon devient aussi grand que le rayon de l’orbite de la planète Mars. »
Etude de la formation des étoiles
L’espace entre les étoiles n’est pas complètement vide. Il est rempli de gaz de faible densité composé d’atomes, d’ions et de molécules, ainsi que de poussières. Cette matière interstellaire absorbe et diffuse la lumière, produisant un rougissement et un affaiblissement continus du flux stellaire.
« D’autres absorptions plus localisées, appelées bandes interstellaires diffuses, apparaissent également dans les spectres des étoiles. Elles sont dues à l’absorption que l’on pense associée à des molécules très complexes présentes dans le milieu interstellaire dans certaines directions. Ces bandes interstellaires diffuses sont présentes dans la gamme de longueurs d’onde du spectromètre Gaia mesurant les vitesses radiales des étoiles, et sont utilisées pour retracer sa formation dans le disque de la Voie lactée et de ses bras spiraux. »
Quasars et astéroïdes
À la limite de notre univers observable et à l’une des extrémités de son échelle de distance, Gaia détecte des quasars. Dans le ciel, certains quasars peuvent se situer près d’une galaxie de très grande masse.
« Le trajet de leur lumière est alors courbé par le puits gravitationnel formé par cette galaxie, et tout se passe comme si leur lumière traversait une lentille. Le phénomène de lentille produit un mirage gravitationnel qui peut être utilisé pour estimer directement l’âge et le taux d’expansion de l’Univers. Au cours des derniers mois, les équipes Gaia ont identifié 381 nouveaux candidats de lentilles gravitationnelles. »
« À l’autre bout de l’échelle de distance, les équipes Gaia ont retravaillé les observations obtenues pour 156 764 astéroïdes. Ils ont utilisé 66 mois de données au lieu des 34 mois disponibles pour la constitution du catalogue Gaia DR3. Ainsi, les observations de la plupart des astéroïdes de la ceinture principale couvrent désormais une révolution complète autour du Soleil, ce qui conduit à une augmentation spectaculaire de la précision des orbites. »
L’expertise des astrophysiciens de la KU Leuven, de l’Observatoire royal de Belgique, de l’Université libre de Bruxelles, de l’Universiteit Antwerpen et de l’Université de Liège joue un rôle important dans le traitement et l’analyse des données Gaia en général, et dans la mise en œuvre des produits ciblés (Gaia Focused Product Releases) en particulier.
Ils sont soutenus dans leurs efforts par la Politique scientifique fédérale de Belgique (BELSPO) via le programme PRODEX de l’ESA.